Lorsque le rapport de la CIASE fut publié, il fut évident pour les membres de l’EAP (Equipe d’Animation Pastorale) de la paroisse de Talence qu’il y avait là un évènement dramatique majeur pour nos communautés chrétiennes et pour l’Eglise universelle, qui risque ainsi de se trouver disqualifiée lorsqu’elle annonce l’évangile de l’amour… Que des loups aient pu impunément se déguiser en pasteur et profiter de leur emprise spirituelle, psychologique et affective pour porter atteinte à l’intégrité physique et morale d’enfants, d’adolescents ou de femmes est proprement scandaleux. Nous devions le crier haut et fort.
Plus jamais ça
« Plus jamais ça » en écho au « Plus jamais la guerre » lancé par le pape Paul VI à l’ONU, fut le titre donné aux deux soirées que nous avons organisées avec tous les paroissiens interpellés par ce grave péché que le rapport qualifie de systémique. En effet, ce rapport révèle, qu’au-delà des actions individuelles a existé une connivence inexplicable et inacceptable de membres de la hiérarchie de notre Eglise.
Cette Eglise, nous en faisons tous partie et nous l’aimons, car elle est le Corps du Christ, nous le rappelle St Paul. Et cela fait mal de la voir ainsi salie et désavouée.
Mais l’heure est à la vérité…
- La première soirée (3 décembre) s’est déroulée en deux phases. Après avoir lu de courts témoignages de victimes, une juriste nous a présenté une synthèse du rapport et une psychologue et un prêtre-médecin nous ont apporté un éclairage sur les mécanismes d’emprise, qui ont abouti aux prédations massives dont le chiffre annoncé dépasse l’entendement. Puis, par un travail d’échanges en petits groupes, nous avons recueilli plus de 80 questions.
Les 90 participants à cette soirée ont pu apprécier le climat d’écoute et de réflexion responsable de chacun.
- Après un classement des questions en 5 thèmes, la deuxième soirée (7 janvier) a proposé aux groupes de travail un exercice difficile dans un temps certainement trop court. Il s’agissait de formuler les problématiques soulevées par les thèmes choisis ; puis d’affirmer des convictions fortes éclairées par la parole de Dieu (ex : la primauté du service et non du pouvoir, le respect inconditionnel des petits et des faibles, l’audace de la correction fraternelle, etc…). Enfin, toujours avec l’éclairage de la parole de Dieu, oser des propositions pour changer positivement nos fonctionnements en Eglise afin de retrouver la saveur de l’évangile avant de se soucier de rentabilité pastorale ou autre. Certains groupes vont continuer le travail inachevé.
Pour conclure
Les résultats des groupes seront diffusés par l’EAP au Conseil pastoral. Parmi les 5 thèmes qui ont émergé (Accompagnement des enfants et familles en situation de fragilité ou touchées par les abus ; Education affective et sexuelle ; mission des prêtres, gouvernance de la paroisse et liberté de parole ; relations prêtres-laïcs), les trois derniers seront à nouveaux travaillés dans le cadre de la démarche synodale proposée par notre évêque.
Les paroissiens talençais ont saisi la pertinence des enjeux pour notre fonctionnement en Eglise. Cela dénote une maturité, une appartenance engagée envers notre Eglise, une volonté de construire et pas seulement de dénoncer, même si cette phase fut nécessaire pour faire droit à la vérité. Car il va falloir réparer les crimes commis à l’égard de jeunes consciences qui ont été abusées par ceux-là même qui devaient vivre en cohérence avec le message d’amour de Dieu dont ils se sont ignominieusement servis à leur profit. Un membre de l’EAP n’a pas hésité à rappeler, lors de la deuxième soirée, les paroles dures de Jésus à l’encontre des fauteurs de scandale !
L’Eglise est composée de pécheurs, nous le savons bien. Qu’elle devienne plus que jamais une Eglise de repentis et de convertis, remplie d’espérance. Que leur unique souci soit l’oubli de soi pour ne vivre que pour le souci des autres, les aider dans toutes formes de détresse et leur communiquer la joie de l’évangile. C’est pour cela que le Christ est venu.
Guy Vidal et Odile Guisthau
